Comment je suis venue à l'accouchement à domicile...
Lorsque j'ai été
enceinte de ma première, j'étais complètement sous l'emprise du diktat
médical, je n'imaginais pas qu'on pouvait accoucher ailleurs qu'à
l'hôpital...je leur faisais confiance, je pensais que j'avais "besoin"
d'eux.
Aussi, j'ai "comme tout le monde" (c'est que la sage femme me
l'avait dit) demandé la péridurale, résultat : une anesthésie surdosée,
je ne sens rien du tout, je ne peux pas pousser, on m'appuie (et elles
s'y mettent à deux) sur mon ventre, le coeur de bébé s'arrête, c'est un
peu la panique, le médecin fait couper le monitorring pour ne pas que
je stresse, on me met un masque à oxygène, il pratique une super épisio
et me dit : "encore une pousée sinon, forceps ! alors faites un
effort", un effort mais quel effort, comment pousser ? je n'en ai pas
la moindre idée tout ce que je sais faire c'est serrer les abdominaux
au maximum, l'une des sage femme a quand même l'idée de me tirer les
mains en avant pour que je tire sur les genoux, ils m'extirpent bébé,
elle est bleue, ils l'emmènent tout de suite... on me laisse seule je
ne comprends rien, c'est comme ça que ça se passe... je ne peux pas
même pas voir mon bébé ? une sage femme revient et fait sortir le
placenta, elle me dit que bébé va bien et qu'on va me l'amener
bientôt... je reste seule à nouveau, le temps me parait bien long...
mais où est bébé ? j'essaye de me lever, impossible je ne sens pas mes
jambes et puis enfin on m'amène bébé, je suis assez décontenancée, elle
pleure je ne sais pas quoi faire, je regarde cette petite crevette,
c'est mon bébé ? mon dieu que faut il faire? je n'ose pas la
toucher, elle parait si fragile si lointaine, entre temps on m'a remise
dans la salle de travail (pas de place ailleurs), heureusement une
maman qui attend son second me conseille "mets la sur ton ventre, tu
vas voir elle va s'arrêter de pleurer" effectivement ma puce arrête de
pleurer et je peux enfin la contempler... et faire connaissance.
Je
ne me pose pas trop de questions à cette époque, tout le monde me dit
"tu n'as pas eu mal du tout, tu as bien de la chance et ça n'a duré
qu'une heure 1/2" moi je ne sais pas trop, je trouve avoir été plus
spectatrice qu'actrice et surtout je n'ai pas su faire quand on m'a dit
de pousser ... pourtant j'avais fait la préparation et j'ai fait ce
qu'on m'a dit...
Quelques
années plus tard j'attends mon second, tout se passe très bien, mon
homme doit partir une semaine à l'étranger quelques jours après le jour
J, mais voila le jour J arrive et bébé n'est toujours pas né... je
serais donc seule, mais je refuse le déclenchement ça me parait trop
agressif, un soir je sens des contractions qui sont d'emblée fortes,
j'ai juste le temps que mon papa m'emmène à la clinique, ma petite est
déposée chez sa mamie. J'arrive, n'ayant pas compris que la péri était
à l'origine des problèmes que j'avais eu avec la première j'en
redemande une, et là (oh miracle de la providence) il est trop tard
pour une péri, enfin sur le moment j'accuse le coup, toute seule et
sans péri va falloir assurer ...je n'ai pas bien le temps de réfléchir
de toute manière, la sage femme me fait allonger sur la table et se met
en tête d'accélérer les choses alors que le travail est hyper rapide
(bébé est né en 3/4 d'heure) je ne sais pas pourquoi elle est si
pressée (peut être veut elle abréger mes souffrances qu'elle ne peut
pas diminuer?), elle rompt la poche des eaux, les contractions
deviennent insupportables et je pense qu'elle essaye de décoller les
membranes ça me fait super mal, je lui demande d'arrêter, ça la vexe et
elle se met dans un coin ! quelle bonne initiative car je "prends les
choses en main" la douleur est énorme, je suis sur le dos, pas moyen de
bouger mais je sens la tête de bébé qui descend, qui progresse, c'est
fabuleux, je hurle à chaque contraction et puis j'ai tout d'un coup
j'ai une envie folle de pousser je le lui dis, elle me répond "il faut
attendre que le médecin arrive" je lui réponds que je ne peux pas
attendre et qu'on n'a pas besoin de lui, et je pousse, la tête sort,
une seconde poussée et son petit corps tout chaud glisse, c'est
délicieux, c'est extraordinaire, je n'en reviens pas j'ai mis mon bébé
au monde ! c'est d'une intensité hallucinante, je suis tellement fière
de moi, elle dépose bébé sur moi et le met à téter...je lui dis qu'il
valait bien la peine que je souffre un peu, elle sourit... je crois
qu'elle est soulagée que tout ce soit bien passé. Le médecin arrive
après la bagarre et dit sèchement à la sage femme "pourquoi ne lui
avez-vous pas fait une péri ?" la sage femme répond doucement, elle est
arrivée à 7 c'était trop tard", il parait en colère (probablement car
il ne touchera pas sa prime de démoulage !) et me recoud...
moi je
suis au nirvana, je n'arrête pas de penser à l'intensité de cet
accouchement, je suis tellement heureuse, je dévore mon bébé des yeux,
il tète bien, c'est un gros bébé de 4kg 100 qui me regarde aussi
intensément...
Quelques
années passent à nouveau et nous mettons en route le petit troisième,
je sais déja qu'il n'est pas question que j'aie une péridurale mais je
veux plus, instinctivement, je sais que je peux mettre mon enfant au
monde alors je me renseigne beaucoup sur le net, je découvre plusieurs
sites et associations pour un accouchement plus naturel, je rédige un
projet de naissance, mon gynéco refuse plusieurs points (pas de
perfusion, liberté de position, pas de rasage lui paraissent
impossibles !!) je vais voir les différentes maternités alentour,
impossible de trouver quelqu'un qui accepte mon projet, une sage femme
pourtant me dit qu'elle comprend mes souhaits, qu'ils sont légitimes
mais que dans la structure où elle travaille elle n'a pas le "droit" de
les mettre en oeuvre... je suis très déçue... je ne sais pas quoi
faire... et je me prépare à accueillir bébé toute seule, je pense que
je peux le faire, en fait je sais que je peux accoucher seule, c'est
une fois bébé sorti que je me pose des questions : quoi faire avec le
cordon, comment faire sortir le placenta, et si je fais une hémorragie
... mais en même temps je sais que tout va bien se passer...
La
venue de T... (la sage femme de H...) est vraiment une histoire
marante, mon père et sa compagne venaient nous rendre visite ici à
T..., lors de leur trajet, ils se sont arrêtés à H... pour visiter un
peu. Un jour avec leur camping-car ils s'arrêtent sur le bord de la
route et regardent leur carte car ils ne savaient pas trop où ils
étaient, une personne s'arrête et les renseigne c'était T qui
leur déconseille le lieu où ils voulaient dormir près d'une falaise car
c'est un lieu peu sûr et leur propose son jardin pour une nuit. Et
voila qu'ils discutent apprennent qu'elle est sage femme, qu'elle fait
des AAD (accouchements à domicile) et sillonne H... avec sa baignoire
sur le toit de sa voiture pour aller aux accouchements... ils la
trouvent formidable et échangent leurs coordonnées. Ici nous discutons
pas mal et je leur dis que je voudrais accoucher à la maison mais que
j'aimerais mieux qu'il y ait une sage femme avec moi or ici aucune ne
veut faire d'AAD. Alors ils me racontent que justement ils ont discuté
avec une sage femme de H... et me donnent ses coordonnées. Je l'ai
contactée lui ai expliqué ma situation et lui ai demandé si elle serait
ok pour venir elle a dit oui et voila ! c'est une femme extraordinaire,
maman de 8 enfants, elle en a adopté 4 autres...
Bébé se pointe 8
jours après DPA (dâte prévue d'accouchement), j'accouche dans une
petite piscine gonflable pour enfants, c'est extraordinaire, je fais
tout toute seule, avec juste la sécurité de savoir qu'il y a une
personne expérimentée qui est la au cas où, intensité magique de ce
moment animal où on se contente de vivre, de survivre à ce flot de
sensations intenses... bébé est là dans mes bras, il respire tout de
suite sans problème, il ne pleure pas regarde tout autour de lui,
tranquillement, et se met à téter, je reste dans la piscine très
longtemps, mais ma sage femme finit par me dire "Il faut sortir de
l'eau pour le placenta" je l'avais complètement oublié celui-là !! papa
prend bébé, les enfants sont ravis et lui font des bisous, je sors mais
je n'ai plus de contractions, le placenta ne veut pas sortir, elle me
fait m'accroupir et me masse un point sur le tibia, les contractions
reprennent aussitôt, pour m'aider à l'expulser elle me dit de souffler
sur ma main comme si je voulais gonfler un ballon, effectivement le
placenta sort d'un coup... et nous pouvons tous ensembles
reprendre notre tête à tête avec bébé, moment d'éternité suspendue...
avec un merci et une reconnaissance infinie à ma sage femme, cette
sainte femme qui respecte les mamans, toutes les mamans.
Je souhaite à toutes les mamans de connaître ce bonheur immense et irremplaçable d'une vraie mise au monde de leur enfant.
P...